Le sport
- Faire du sport avant les hormones
- Faire du sport après les hormones
- Faire de la compétition
- Pour conclure
1. Faire du sport avant les hormones
C’est bien sûr la période la plus difficile et la plus conflictuelle. La très grande majorité des sports voient leurs pratiquants séparés par sexe pour des raisons de performance physique et donc par souci d’équité entre les participants.
Donc, si l’on souhaite avoir une activité sportive, on se retrouve forcément en compétition avec des filles alors que l’on est un garçon. Sans se la jouer macho de base, se mesurer avec des filles n’est pas idéal pour son ego de jeune mâle lol. Cela peut aussi conduire à s’interroger sur sa propre masculinité à la vue de vos performances physiques si vous n’arrivez même pas à « battre » certaines filles. Non, ce n’est pas de la fierté mal placée. Il faut bien comprendre qu’avant d’avoir entamé sa transition physique, il arrive que l’on ait besoin de se raccrocher à tout ce qui peut nous aider à se sentir un peu nous. Courir après ces stéréotypes peut paraître futile, idiot et parfaitement inutile, mais ils sont pour certains un moyen de se construire et de se préserver comme ils le peuvent.
La pratique des sports collectifs parmi les filles entraîne pour beaucoup un sentiment persistant de malaise et de mal-être. On ne se sent pas à sa place et les autres le remarque aussi. On en arrive rapidement à être isolé et voire fuit des autres, dans le cas les plus extrêmes on peut arriver jusqu’aux railleries voir pire.
Lorsque nous pratiquons un sport en mixte, nous ne nous sentons pas forcement mieux car nous ressentons bien vite que nous ne sommes pas considérés d'égal à égal par nos partenaires sportifs masculins. La séparation des sexes reste perceptible et ne permet pas au transsexuel de se sentir bien surtout à l'adolescence.
La grande angoisse qui va avec le sport est la peur des vestiaires. C’est un endroit spécial, lieu de promiscuité, d’échanges et de déshabillage ^^’. C’est l’endroit par excellence où on se sent gêné de son corps qui renvoie à soi et aux autres une vérité douloureuse : ce corps, ce n’est pas vous et pourtant il est bien là visible de vous et des autres. En plus de ça, on se retrouve dans un lieu interdit, le vestiaire des filles est par définition interdit aux garçons sauf dans votre cas ^^’. C’est une situation qui peut être très gênante, on peut avoir la sensation de violer l’intimité des autres personnes présentes dans le vestiaire. Nous avons la sensation d'être un intrus et pourtant la légitimité de notre présence ne fait aucun doute pour les autres. Tout ceci met très mal à l’aise. Oui, je sais ça peut paraître paradoxal surtout quand on voit le nombre de garçons qui aimeraient pouvoir se rendre dans le vestiaire des filles incognito lol.
Il reste les sports individuels, que l’on peut pratiquer seul comme la course à pied ou le vélo par exemple. N’ayant plus de rapport direct avec d’autres personnes, vous n’avez pas à souffrir de l’image que vous renvoyez aux autres et de tout le contexte social qui va avec comme les vestiaires. Vous êtes seul avec vous-même. Cela semble être une solution plus simple à gérer. Toutefois, dans mon cas, ça n'a servi qu'à déplacer le problème sur le fait que quoique je fasse et aussi fort que je m’entraîne, je ne pourrai pas lutter contre la génétique ce qui me procurait une grande tristesse et un lourd sentiment d’impuissance.
Il y a un autre frein à la pratique sportive pour un ftm, les binders. Un binder est une solution visant à masquer la poitrine pour avoir, du moins sous un t-shirt, un torse masculin. Il existe plusieurs techniques pour comprimer la poitrine qui sont présentées ici : article " Bandage du torse ". Ces techniques ont un point commun majeur : la compression du torse. La poitrine n'est pas la seule à subir cet effet, votre cage thoracique y est également soumise. Pratiquer un sport alors que vous avez une gêne pour respirer peut être dangereux, il est possible de faire des malaises .
Moralement tout cela peut s’avérer destructeur et conduit pour beaucoup à l’arrêt pur et simple du sport pour se préserver au maximum. Malheureusement cela peut induire aussi une solitude grandissante, limitant le relationnel à quelques personnes vraiment proches avec qui on peut être soi. Ce corps qui finalement n’est pas le notre, on a du mal à l’entretenir et à en prendre soin ce qui peut conduire a des laisser aller avec une prise de poids notamment.
2. Faire du sport après les hormones
L'arrivée des hormones changent beaucoup de choses mais tous les problèmes ne sont pas résolus pour autant. Une fois les taux bien stabilisés dans le corps, la testostérone procure une plus grande énergie qu’il est bon de mettre à profit. Le goût du sport revient souvent à ce moment là. On se sent mieux et on a envie de se faire plaisir et de prendre du muscle pour se sentir bien, se sentir beau, se sentir soi. Toutefois, avant d’avoir eu la mammectomie la pratique d’un sport me semble très difficile dans le cadre d’un club sportif mais également dans un sport individuel.
Avec les hormones, il est hors de question de sortir sans un bandage du torse ce qui limite les capacités respiratoires. Déjà avant, retirer les bandages n’était pas une chose que nous faisions avec plaisir… Faire un effort physique ou d’endurance avec une telle compression peut être dangereux pour votre santé. Il vaut mieux se limiter à de la marche pour s’entretenir et prendre son mal en patience.
Une fois la mammectomie faite, les choses reprennent une allure beaucoup plus normale. Vous avez pleinement pris votre place dans le monde. Mais on oublie pas des années de privation et de frustration en quelques secondes. Retourner dans un club, reprendre un sport et affronter à nouveau l’épreuve des vestiaires ne se fait pas sans stress. On peut avoir peur au début de ne pas être à la hauteur, qu'on pose des questions gênantes dans les vestiaires ou tout simplement qu’on vous trouve « bizarre », qu'on vous juge. Il faut relativiser tout ça, il y a vraiment fort à parier que tout se passe très bien. Le premier pas est le plus difficile mais très vite on se rend compte que tout va bien.
Pour les vestiaires, pas de panique. Si vous stressez à cause de vos cicatrices sur le torse, il suffit de dire qu'on vous a opéré un peu plus jeune pour une gynécomastie. Ce n’est même pas complètement un mensonge et c’est une opération tout à fait légitime pour un garçon. Pour le reste de votre anatomie, il faut savoir que tout le monde ne se met pas à poil dans les vestiaires pour la douche. Beaucoup d’hommes préfèrent se doucher chez eux et préserver leur intimité. On ne vous regardera pas de travers si vous ne vous douchez pas dans les vestiaires après votre entraînement. Par contre, si vous êtes amené à vous changer et à vous retrouver en caleçon, un packing (cf. prothèses péniennes) est plus que recommandé. Tout doit avoir l’air à sa place. A ce sujet, il est inutile de se la jouer star du porno avec un engin de 20cm au repos lool, ça ne sert à rien et ça va vous gêner pendant votre entraînement .
Durant la pratique de votre sport, il se peut que vous vous interrogiez sur vos performances vis-à-vis de vos partenaires. Là aussi il faut relativiser tous les hommes de naissances sont loin d’être des sportifs de haut niveau avec une endurance et une force exceptionnelle. Il y a tous les niveaux et tous les physiques. Pour vous c’est exactement pareil, vous êtes simplement vous avec vos qualités et vos défauts sportifs. Tous les êtres humains ont des physiques différents, il ne faut pas idéaliser certaines choses.
3. Faire de la compétition
Les accrocs et les passionnés de leur sport pratiquant avant, pendant et après leur transition, seront confrontés à leur fédération sportive pour toute participation à une compétition officielle, allant de la départementale jusqu’au championnat de France et même jusqu’au Jeux Olympiques pour les plus doués.
Avant la transition, il n’y a pas grand chose à dire. Vous participez sous votre prénom de naissance et dans les catégories qui vont avec votre sexe de naissance. Vous n’avez pas, normalement, à vous soucier des contrôles anti-dopage.
Tout se complique au cours de votre transition et, surtout, tant que vous n’avez pas votre changement d’état-civil. Les produits employés dans l’hormonothérapie des transsexuels ftm sont classés dans la catégorie des produits dopants. Voilà déjà un premier souci de taille pour ceux qui pratiquent à un assez haut niveau et qui souhaitent continuer. Deuxième souci : l'enregistrement à votre fédération suit votre état-civil. Donc, comment changer de catégorie pour aller chez les hommes ?
En mai 2004, le Comité International Olympique qui, il me semble, est la plus haute instance de coordination sportive internationale, a statué sur la participation aux Jeux Olympiques des personnes transgenres dans leur sexe de ré-assignation. La décision a été prise de les laisser participer dans les catégories de leur nouveau genre après une évaluation personnelle confidentielle et sous certaines conditions administratives et médicales.
Ces conditions sont simples : avoir plus de 2 ans de traitement hormonal, avoir eu une gonanectomie (ablation des gonades : ovaires pour les ftm, testicules pour les mtf) et avoir obtenu son changement d’état-civil.
A partir de là, votre traitement, et en particulier votre prise de testostérone, ne pourront pas être assimilés à un dopage à condition que vos taux se maintiennent, bien entendu, dans la moyenne masculine.
Voici les textes du C.I.O rendant public et officiel cette position au sujet des sportifs transsexuels :
C.I.O Déclaration du consensus de Stockholm, le 28/10/2003
C.I.O Note explicative, le 17/05/2004
Extrait du site officiel : http://www.olympic.org/
Remarque : pour les intersexués ayant eu des opérations de re-assignation avant la puberté, leur acceptation n’est pas soumise à une évaluation.
De manière générale, la transsexualité dans les compétitions sportives est encore controversée surtout pour les mtf* qui se voient reprocher d’avoir certaines capacités masculines (ossature et capacité pulmonaire en particulier) qui ne changent pas même avec leur traitement. Cela est parfois vu comme un manque de fair-play envers les autres concurrentes. Une fois de plus, les ftm sont les grands invisibles, j’en déduis donc qu’ils ne semblent pas poser problème, peut-être pour les raisons inverses qui font parler les médias au sujet des transsexuelles mtf dans le sport…
Pour résumer un petit peu, une fois votre changement d’état-civil obtenu et quelque soit votre fédération, les compétitions vous sont ouvertes comme pour n’importe qui dans les catégories de votre nouvel état-civil, donc chez les hommes.
Ceci ne résout pas le problème durant de la transition . Le plus simple étant de ne pas faire de compétition pendant cette période. Toutefois, la politique de l’autruche n’a jamais contribué à faire avancer les choses. Chaque fédération sportive est souveraine sur ces règlements, c’est donc vers elle qu’il va falloir se tourner en leur expliquant votre situation. De cette façon, vous allez contribuer à une meilleure visibilité, une meilleure reconnaissance et acceptation des ftm. Si votre fédération se montre favorable pour un seul, elle le sera forcément pour tous les autres, c’est comme ça que les choses avances. Dans ce cas, contactez moi que je puisse constituer et publier ici une liste des fédérations favorables ou défavorables pour une meilleure information des personnes transgenres.
Il existe également des associations sportives LGBT et sympathisant permettant à ses membres de pratiquer leurs sports dans le respect mutuel, de faire des tournois et de lutter ensemble contre les discriminations. Vous pouvez, vous aussi, via ces associations être l'instigateur d'une nouvelle activité sportive ou de la création de nouvelles équipes transgenres. Une telle démarche existe déjà sur Paris. A chacun de vous de reproduire l'initiative dans votre région.
4. Pour conclure
Cet article se base énormément sur ma propre expérience des choses et sur différents témoignages que j’ai pu recueillir à ce sujet. Il y a autant de façon de vivre les choses que de gens sur terre, j’en suis bien conscient. Il est impossible de faire des généralités sur toutes les choses touchant la situation d’un transsexuel. Je suis ouvert à tout nouveau témoignage qui permettrait de faire évoluer cet article, il suffit de me contacter. Le but est juste de donner une idée aux non-transsexuels des situations que nous pouvons rencontrer ainsi qu’une part de notre ressenti. Pour les lecteurs trans, il s’agit de montrer qu’ils ne sont pas seuls à rencontrer des difficultés, qu’il est possible de les surmonter et de faire avancer les choses .
Article* écrit pour vous par Izechiel.
*Cet article est soumis aux lois sur la propriété intellectuelle. Il est la propriété exclusive de son auteur.
Toute reproduction, modification, publication même partielle est strictement interdite.
Tout contrevenant s’expose à des sanctions.
Date de création : Déc. 2007
Dernière mise à jour : juin 2015